De l'artisanat à l'industrie
L'artisanat textile se développe à Wattrelos, à partir du XIVe siècle comme activité complémentaire à côté de l'exploitation agricole.
L'été, on est aux champs, l'hiver sous le chaume à filer ou à tisser. Mais la croissance de cette activité sera, à plusieurs reprises, entravée par l'attitude hostile des entrepreneurs lillois, soucieux de garder le monopole de la fabrication. Cela jusqu'à la Révolution qui instaurera la liberté du commerce et de l'industrie.
Au XIXe siècle, par rapport à Roubaix et Tourcoing, le développement de l'industrie est lent et modeste.
Wattrelos restera longtemps un bourg agricole. En 1830, 80 % du territoire est consacré aux labours et aux prairies. Et il faudra attendre le milieu et la seconde moitié du siècle pour que l'industrie commence à s'implanter.
Le tissage D'Halluin-Lepers s'installe en 1845. Puis 20 ans plus tard, Leclercq-Dupire, première fabrique de Wattrelos, avec 600 ouvriers.
Cependant, le travail à domicile reste l'activité principale des ouvriers textiles wattrelosiens.
En 1876, ils sont 3 200 à travailler chez eux ou dans de petits ateliers, tandis que 2 000 rejoignent les usines.
Ayant besoin d'une main d'œuvre nombreuse, les grands industriels envoient des rabatteurs dans les hameaux : ils débauchent les ouvriers à domicile en proposant des salaires plus élevés. Ce mode de fabrication va donc connaître un déclin irrémédiable qui s'étalera jusque la fin du XXe siècle. Le dernier métier à tisser de Wattrelos a cessé de fonctionner au début des années 80.
Au début du XXe siècle, le développement industriel a lieu à cheval sur Roubaix et Wattrelos.
Le peignage Amédée-Prouvost est transféré du centre de Roubaix à la limite des deux communes puis, non loin de là, en 1912, La Lainière de Roubaix, dont la plus grande partie des installations est située sur Wattrelos, ouvre ses portes.
Jusqu'aux années 70, l'entreprise obtient de nombreux succès commerciaux telles que la laine Pingouin en 1925, les chaussettes Stemm en 1948 ou les tricots Rodier.
La visite en 1957 de la reine d'Angleterre et du premier secrétaire de l'Union soviétique Nikita Krouchtchev en 1960 confirment la renommée mondiale de la firme. A cette époque, l'entreprise compte 6 000 salariés. Elle fermera ses portes début 2000.
Le mouvement ouvrier
Au printemps 1880, après un hiver particulièrement rigoureux, marqué en plus par un chômage massif chez les fileurs, les ouvriers cessent le travail pour obtenir une augmentation compensant la hausse du coût de la vie. En effet, les prix du kilo de beurre et de pommes de terre a pratiquement doublé. Les grévistes wattrelosiens se distinguent en organisant le passage en fraude, à grande échelle, entre la Belgique et la France, de produits de première nécessité. Ainsi, ils passent la frontière, par flots irrépressibles, en chantant : "J'ai du bon tabac". Les bénéfices accumulés leur permettent de tenir quelques temps. Mais finalement, cette grève est un échec qui ne reste pas sans conséquences.
Le leader socialiste flamand Edouard Anseele juge que les ouvriers ont mal préparé le mouvement en n'ayant ni structures, ni réserves. Il cite l'exemple de la coopérative gantoise qu'il préside, le Vooruit, "citadelle d'où la classe ouvrière bombarde la bourgeoisie à coup de tartines et de pommes de terre".
Le conseil est écouté par les militants socialistes wattrelosiens. Au mois de novembre 1897, la coopérative ouvrière L'Humanité voit le jour dans le quartier de la Vieille Place avec, déjà, 150 inscrits. Elle comprend une boucherie, une boulangerie, une charcuterie et une épicerie.
A son apogée, la coopérative comptera 800 adhérents.
L'autre conséquence de l'échec de cette grève causée par l'intransigeance patronale, c'est le remplacement à la tête du syndicat des ouvriers textiles d'un partisan de l'entente entre patrons et ouvriers par un militant plus combatif : Henri Carette, futur maire de Roubaix. Prévues en 1881, les élections législatives approchent. Ce dernier décide de faire appel à Jules Guesde, leader du parti ouvrier français, pour défendre les idées du socialisme dans la 7e circonscription (Roubaix-Wattrelos).
Face au candidat bonapartiste Pierre Catteau, la défaite est cuisante. Pas plus de 492 voix, dont seulement 8 à Wattrelos. Le socialisme en est à ses débuts... Il progresse alors année après année et en 1893, Jules Guesde est élu député avec 6 879 voix parmi lesquelles 718 à Wattrelos.
La même année naît la Fraternelle de Wattrelos, d'abord rattachée à la section roubaisienne du parti ouvrier français.
En 1896, les socialistes wattrelosiens s'estiment assez forts pour créer leur propre section. En 1900, 8 socialistes entrent au conseil municipal. Parmi eux, Henri Briffaut qui sera maire de 1912 à 1938.
C'est le début d'une tradition politique quasiment ininterrompue depuis (seul François Mériaux fut maire communiste de Wattrelos de 1945 à 1947). Se sont succédé au poste de premier magistrat les socialistes Florimond Lecomte (maire de 1938 à 1944), Louis Dornier (de 1944 à 1945), Albert D'Hondt (de 1947 à 1957), Jean Delvainquière (de 1957 à 1971), Alain Faugaret (de 1971 à 2000) et Dominique Baert (depuis 2000).